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Le droit au mentorat

Le 19 janvier 2022, à l’occasion des 2èmes Assises du Mentorat, le Collectif Mentorat et ses membres ont solennellement appelé à l’émergence d’un droit au mentorat et publié une tribune dans le JDD.

Depuis, l’association porte un plaidoyer pour permettre à chaque jeune qui en a besoin d’être accompagné par un mentor.

Appel pour un droit au mentorat

La France est confrontée à un défi, aussi essentiel qu’urgent : la lutte contre les inégalités qui impactent très concrètement le parcours éducatif et d’insertion d’un très grand nombre de jeunes. Dans ce combat, le rôle fondamental de l’État, de l’école, des entreprises, des corps intermédiaires ne pourra véritablement se déployer sans une société plus fraternelle, où on se rencontre, où on se mélange, où on sort de ses cercles sociaux, territoriaux (voire virtuels désormais) pour comprendre, inspirer, partager et transmettre.

Le mentorat, relation interpersonnelle d’accompagnement fondée sur une ouverture et un apprentissage mutuels, constitue une réponse à ce besoin devenu essentiel et urgent dans les sociétés modernes : celui de réinventer la façon dont nous faisons société. Le mentorat peut et doit devenir un outil clé de la cohésion sociale et de la lutte contre les inégalités dans la France du XXIe siècle.

Lire la suite de l'appel

Vers un droit au mentorat

Cette ambition est à notre portée. La France a une chance : elle est en Europe l’un des pays où les associations de mentorat sont les plus nombreuses, les mieux structurées. Rassemblées au sein du Collectif Mentorat, elles ont posé avec l’Etat les bases d’une généralisation du mentorat. En 2021, grâce au programme gouvernemental 1 jeune, 1 mentor, 100 000 jeunes ont trouvé un mentor. 100 000 binômes partagent leurs vies. Des citoyens de tous les âges, de toutes les origines, de tous les quartiers.
La réussite, tant quantitative que qualitative de cette première étape nous permet aujourd’hui de viser la généralisation du mentorat pour tous les jeunes qui en auraient besoin. C’est pourquoi nous appelons les candidats à l’élection présidentielle à construire les bases d’un droit au mentorat qui doit s’articuler autour de trois publics : les jeunes mentorés, les mentors et les associations de mentorat.

Chaque jeune qui en a besoin doit pouvoir trouver un mentor

Qu’il soit proposé à un enfant, un adolescent ou un jeune adulte, le mentorat impacte positivement la vie des jeunes accompagnés. Le mentorat diminue de 30 % le risque de décrochage en première année d’enseignement supérieur et augmente de 18 % les chances d’accéder à un emploi au bout de six mois en fin d’études.¹ Par ailleurs, 80 % des mentorés soulignent que leur mentor a eu un impact sur leurs choix d’orientation scolaire ou professionnelle.²
L’accès au mentorat doit être élargi à un plus grand nombre de situations dans lesquelles les inégalités apparaissent. Pour que chaque jeune y ait accès, où et quand il en a besoin.
Les inégalités qui fragilisent notre société sont multiples et interviennent à différents moments d’une vie : études, emploi, services, accès à la culture… Face à cette réalité, le mentorat est un outil de transformation sociale particulièrement puissant qui permet de redonner tout leur potentiel à des trajectoires marquées par les déterminismes sociaux et territoriaux.
Chaque acteur au contact d’un jeune en situation de vulnérabilité devrait pouvoir entrer en contact avec des associations spécialisées pour proposer un accompagnement complémentaire par le mentorat. A l’école ou au club de sport, dans les associations de quartiers ou les établissements médico-sociaux, à l’université, dans les missions locales ou au Pôle Emploi.
Nous appelons l’Etat et les collectivités territoriales à porter cette vision et à mobiliser dans leur sillage les acteurs privés et publics de l’éducation et de l’insertion professionnelle.

Chacun peut devenir mentor à un moment de sa vie

Être mentor est un engagement personnel et bénévole. Ça n’est jamais du temps perdu. Les bénéfices individuels, sociaux et économiques du mentorat sont multiples et forts. Ils doivent être reconnus plus largement et valorisés pour que chacun soit encouragé à devenir mentor.
Le mentorat ne transforme pas que la jeunesse, il transforme la société. La rencontre de deux personnalités, disait Carl Jung, est comme celle de deux substances chimiques : quand il y a réaction, les deux en sortent transformées. Ainsi, de binômes en binômes, le mentorat déconstruit les préjugés sur les âges, les origines, l’école, les quartiers populaires, le monde du travail. Il fait reculer les discriminations et progresser la confiance.
Le mentor déploie son empathie, son adaptabilité, sa curiosité, son ouverture d’esprit, sa capacité d’écoute et de proposition. Autant de compétences dont personne ne niera le caractère déterminant dans la performance des organisations. Pourtant, aujourd’hui, l’engagement au titre du mentorat ne bénéficie que de peu de reconnaissance.
Nous appelons à ce que le rôle du mentor soit reconnu et valorisé, à ce que le mentorat soit intégré aux parcours de compétences dans l’enseignement, les entreprises et l’ensemble de la société, pour que chaque personne qui le souhaite soit encouragée à devenir mentor.

Les associations de mentorat doivent être soutenues dans leur développement

Mobiliser, former, informer et encadrer des milliers de mentors et de jeunes ne s’improvise pas. Sans soutien aux associations dont c’est le métier, le mentorat n’a pas d’avenir.

Le plan 1 jeune, 1 mentor a marqué une étape importante pour soutenir l’émergence et la professionnalisation du mentorat. En se structurant au sein d’un collectif et en partenariat avec l’Etat, les associations de mentorat se sont engagées dans une dynamique de mutualisation, d’échanges opérationnels, de montée en qualité et de projection sur les territoires extrêmement prometteuse et qui a d’ores et déjà produit des résultats tangibles.
Cet effort doit être poursuivi, et pour garantir l’ancrage du mentorat au service de la jeunesse dans notre pays, nous appelons à ce que les ressources mobilisables par les organisations de mentorat soient pérennisées et élargies.
Nous appelons à ce que le rôle du mentor soit reconnu et valorisé, à ce que le mentorat soit intégré aux parcours de compétences dans l’enseignement, les entreprises et l’ensemble de la société, pour que chaque personne qui le souhaite soit encouragée à devenir mentor.

Une France du mentorat

Proposer le mentorat à chaque jeune qui en a besoin, encourager chacun à devenir mentor, soutenir le développement des associations de mentorat : les trois axes de cet appel sont l’ossature d’une France plus solidaire et fraternelle où émergerait de facto un droit au mentorat.
Les signataires de ce manifeste appellent les candidats à l’élection présidentielle à se positionner par rapport à cette ambition et portent la conviction que l’avenir du mentorat est devenu un enjeu primordial au service de la jeunesse, de la cohésion sociale et de la lutte contre les inégalités.

Les premiers signataires

Christophe Paris, président du Collectif Mentorat et directeur général de l’Afev
Ericka Cogne, trésorière du Collectif Mentorat et directrice générale de Télémaque
Sébastien Lailheugue, secrétaire du Collectif Mentorat et directeur de Proxité
Salomé Berlioux, directrice générale de Chemins d’avenirs
Benjamin Blavier, co-président d’Article 1
Aurélie Goin, déléguée générale de l’Entraide Scolaire Amicale
Guillaume Marmasse, directeur général de NQT
Julie Tartarin, directrice de Socrate
Nicolas Viennot, directeur du Collectif Mentorat

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Nos 24 propositions pour un droit au mentorat

Mettre le mentorat au coeur de l’école et de l’université

1. Inclure une présentation des dispositifs de mentorat et de leur impact dans la formation des équipes éducatives.

2. Outiller les équipes éducatives pour mettre en place des réunions d’information dans tous les établissements en début d’année scolaire pour présenter les dispositifs d’accompagnement, dont le mentorat, aux élèves et aux parents.

3. Dans le cadre de la politique publique d’accompagnement scolaire portée par le Ministère de l’Education Nationale et de la Jeunesse, désigner un référent académique en charge du mentorat, pour faciliter le lien entre les associations et les établissement scolaires, avec l’objectif de permettre à un maximum de jeunes de bénéficier du mentorat.

4. Intégrer le mentorat dans le portefeuille de dispositifs proposés aux jeunes par les équipes “Mission de lutte contre le décrochage scolaire”.

5. Présenter le dispositif 1 jeune, 1 mentor sur Parcoursup, après la période de saisie des vœux, pour préparer l’entrée des lycéens dans l’enseignement supérieur.

Proposer le mentorat à tous les jeunes qui en ont besoin

6. Proposer le mentorat à tous les jeunes étrangers qui reçoivent une protection internationale pour faciliter leur intégration professionnelle, sociale et culturelle.

7. S’assurer qu’un projet de mentorat est systématiquement proposé aux jeunes de l’Aide Sociale à l’Enfance, notamment aux sortants ou aux jeunes arrivant en fin de parcours, ou mineurs non accompagnés, conformément à la loi du 7 février 2022 relative à la protection des enfants. 

8. Renforcer la communication sur le mentorat auprès des familles via les acteurs socio-éducatifs de terrain, pour augmenter le nombre de prescriptions directement issus des familles.

9. Mettre en place une carte culturelle permettant l’accès aux jeunes et à leurs mentors à des lieux culturels gratuitement.

Valoriser l’engagement des mentors

10. Inscrire des actions de Mentorat dans les cursus universitaires, notamment en développant des UEL (Unités d’Enseignement Libres) spécifiques.

11. Dans Parcoursup, valoriser l’engagement du jeune dans sa relation de mentorat, ainsi que les compétences développées dans ce cadre.

12. Dans le cadre du Service National Universel, inscrire le mentorat comme axe d’engagement de la mission d’intérêt général et adapter les conditions de réalisation (mission sur un ou deux ans).

13. Valoriser l’engagement des mentors en prévoyant une bonification dans le calcul de leurs droits à la retraite.

14. Inciter les acteurs de l’assurance retraite à communiquer sur la possibilité de s’engager comme mentor, pour valoriser la transmission inter-générationnelle.

Mettre le mentorat au coeur de l’entreprise

15. Reconnaître dans les parcours professionnels les soft skills développés par les mentors, en déployant un open badge d’Etat dédié.

16. Encourager, dans les accords et conventions d’entreprises, l’inscription d’un nombre d’heures minimum d’engagement, afin de permettre aux salariés de s’investir dans des programmes de mentorat sur leur temps de travail.

17. Identifier un référent dans les chambres des métiers pour développer la visibilité du mentorat et mobiliser les entreprises.

18. Dans le cadre de la commande publique, valoriser les entreprises qui permettent et incitent leurs collaborateurs à s’engager dans des programmes de mentorat.

Impliquer tous les acteurs dans le développement du mentorat

19. Faciliter la création de partenariats entre les principaux acteurs publics de l’accompagnement des jeunes – insertion et aide sociale – notamment via la mise en place de référents dans les différents lieux d’accueil (réseau Information Jeunesse, missions locales, CJD, dispositifs de l’aide sociale à l’enfance et de la PJJ, etc.).

20. Sensibiliser les acteurs de l’insertion et de l’aide sociale au mentorat et à la complémentarité des dispositifs au moyen d’interventions dans les établissements de formation (Pôle emploi, Cap emploi, Unité emploi des départements, Service d’insertion par l’activité économique des collectivités, OPCO, Instituts Régionaux du Travail Social, Campus des métiers, etc.).

21. Identifier un référent au niveau des DREETS pour sensibiliser les missions locales.

Soutenir le développement des associations qui proposent des programmes de mentorat

22. Pérenniser, au moyen de conventions pluriannuelles d’objectifs, le soutien national aux associations qui développent des programmes de mentorat.

23. Sécuriser l’intégration des associations porteuses de programmes de mentorat sur la liste nationale des organismes habilités à percevoir le solde de la taxe d’apprentissage.

24. Renforcer les moyens humains et financiers des collectivités territoriales pour favoriser la mise en place de programmes de mentorat sur leurs territoires.

Des avancées concrètes en faveur d’un droit au mentorat

Certains jeunes sont particulièrement touchés par les déterminismes. C’est notamment le cas des 330 000 jeunes pris en charge par l’Aide sociale à l’enfance, qui représentent 40% des jeunes sans domicile fixe en France.
Actuellement, très peu de jeunes de l’Aide sociale à l’enfance bénéficient d’un accompagnement par un mentor, moins d’1% d’entre eux, alors que leurs besoins sont immenses et que le mentorat peut être un soutien précieux dans leur parcours.
La promulgation de la loi du 7 février 2022 relative à la protection des enfants constitue une avancée majeure. Elle prévoit en effet en son article 9 de proposer de manière systématique un mentor à chaque enfant confié à l’Aide sociale à l’enfance.

Le 20 mai 2022, pour son premier déplacement en tant que Première ministre, Élisabeth Borne s’est rendue aux Mureaux pour échanger avec des jeunes filles et des femmes qui ont un ou une mentor, et qui bénéficient de l’accompagnement d’une association de mentorat. Elle y a rappelé le soutien du gouvernement au développement du mentorat à travers le plan 1 jeune, 1 mentor, et s’est prononcée pour l’émergence d’un droit au mentorat, répondant ainsi favorablement à l’appel du Collectif Mentorat.
Elisabeth Borne
Première ministre

Il faut que chaque jeune qui a besoin d’un coup de main, car il ne trouve pas dans son environnement proche l’accompagnement dont il a besoin, puisse avoir ce droit au mentorat, que chaque jeune puisse accéder à un mentor. C’est vraiment un enjeu crucial d’égalité des chances. On sait tous que quand vous avez votre famille derrière vous, qui connait les bonnes orientations, qui connaît la façon de bien présenter son dossier, ou quand vous n’avez pas ça, et bien aujourd’hui, vous n’avez pas les mêmes chances.

Le droit au mentorat pour les lycéens professionnels

Le lycée professionnel est trop souvent une voie par défaut et une orientation subie. Pour faciliter l'émancipation professionnelle des jeunes de cette voie, le 4 mai 2023, dans le cadre de la réforme du lycée professionnel, le président de la République a annoncé que 100% des élèves volontaires seront accompagnés par un mentor d’ici 2025.

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