“Y a-t-il un âge pour être mentor ?” Quel accompagnement pour quels mentors ?

Assises du Mentorat 2023
“Y a-t-il un âge pour être mentor ?” Quel accompagnement pour quels mentors ?

À l’image de mentors seniors ou très juniors, les représentations que nous pouvons nous faire des profils et parcours de mentors peuvent limiter nos pratiques. Et si nous nous interrogions avec nos mentors, sur l’âge, les expériences de vie, les postures qui feraient « un bon mentor » ? Qu’est-ce que les expériences intergénérationnelles ou au contraire de forte proximité en âge ont-elles à nous raconter sur la diversité des parcours d’engagement, la vie du binôme (formes et méthodologies) et les objectifs de nos programmes de mentorat ?

 

Objectif de l’atelier :
Déconstruire les préjugés sur l’âge des mentors et sur les spécificités de l’accompagnement à l’aide d’un débat mouvant

 

Intervenants :
Stéfanie BIESMANS | DUO for a JOB
Julie TARTARIN | Socrate
Claudine | mentor DUO for a JOB
Yacine | mentor Socrate

 

Une expérience nouvelle tant pour les seniors que pour les lycéens

Certaines représentations amèneraient à penser que l’expérience de vie des seniors est un facteur facilitant de la préparation au mentorat. Ayant été manager ou en responsabilité, ils seraient davantage en mesure d’être à l’écoute de l’autre. Or, il s’agit d’une expérience nouvelle tant pour les seniors que pour les lycéens, ce qui implique de l’appréhension et de l’apprentissage quel que soit le statut et le profil du mentor. C’est le travail des associations d’accompagner les mentors. Certes les seniors peuvent s’appuyer sur leur expérience de vie et leur réseau, mais de la même façon les lycéens ont leur expérience scolaire.

Tous les mentors, lycéens ou seniors, ont des appréhensions, se remettent en question. 

L’appréhension n’est pas corrélée à l’âge du mentor et à son expérience de vie. Pour DUO for a JOB, même avec une longue expérience professionnelle, 75% des mentors disent avoir des appréhensions avant de se lancer dans le mentorat.

Yacine, mentor lycéen, explique avoir eu des appréhensions quant au fait d’avoir la « responsabilité de quelqu’un », qu’il s’est posé beaucoup de questions, mais que le fait de devenir mentor a marqué l’aboutissement d’une réflexion sur lui-même. L’élément déclencheur de son engagement a été l’envie d’être utile, de se chercher, de se trouver, et de découvrir l’étendue de ses compétences, ce qu’il dit avoir fait à travers le mentorat.

 

L’accompagnement des mentors prend des formats différents et adaptés au rythme de chacun.

Il ne faut pas plus de temps pour accompagner un mentor lycéen qu’un mentor senior. Ce n’est pas tant le temps que la façon de le faire qui va différer. Il est peut être moins adapté pour des lycéens de prévoir de temps long de formation « initiale », la formation en continu paraît plus adaptée. La présence de l’association est effectivement différente, et l’accompagnement prend des formats différents et adaptés au rythme de chacun. Des temps de formation communs pourraient permettre de réunir les différents profils et de comprendre les spécificités propres à chacun. 

Par exemple, les difficultés des seniors peuvent concerner surtout la communication digitale (les réseaux sociaux), alors que les lycéens ont plus de facilités de ce côté-là. Concernant les outils bureautiques / informatiques, seniors et lycéens peuvent avoir une pratique similaire, notamment parce que les lycéens sont encore peu habitués aux outils bureautiques, qu’ils n’utilisent pas dans le cadre du lycée. De la même façon, si la formation aux outils bureautiques est un besoin du mentoré, il faudra prêter attention au matching ou accompagner plus spécifiquement le mentor sur ce sujet. 

Claudine, mentore senior, est engagée depuis longtemps et a eu des expériences associatives et politiques variées. Elle n’avait pas d’appréhension particulière, mais n’était pas certaine d’avoir le profil idéal du mentor, n’ayant jamais fait de CV ou passé d’entretien au cours de sa vie professionnelle. Elle se sentait donc moins préparée, car peu au fait des enjeux du marché et de la recherche d’emploi. Toutefois, les temps de formations, les outils et ressources l’ont aidée à se sentir légitime. L’élément déclencheur de son engagement a été la question de l’immigration, et une volonté de se « mettre à la place de », de se confronter à une nouvelle réalité, qui a, selon elle, transformé sa façon d’être, ses opinions. Cela lui donne le sentiment d’avoir des attaches avec la réalité.

 

L’âge n’apparaît pas comme une variable révélatrice de la persévérance des mentors.

Lycéens et seniors sont tout aussi persévérants. L’association encadrante a un rôle à jouer d’accompagnement de ses bénévoles mais aussi pour créer les conditions de cette persévérance (matching, attention portée à l’éloignement géographique, valorisation de l’engagement, etc.). Pour Socrate et DUO for a JOB, qui mobilisent des mentors dont les profils diffèrent, on note 2% d’abandons seulement, après formation des binômes.

 

La posture du mentor relève moins de l’âge que de ses représentations sociales d’une “personne de confiance”.

Certains mentors disent reproduire ce qu’ils connaissent, tel certains lycéens qui sont tentés de prendre une posture professorale parce qu’ils la vivent au quotidien. Aussi, la représentation que les mentors ont d’une « personne de confiance » influence la posture qu’ils adoptent : le lien de mentorat est rapporté à des relations « connues ». Cela dépend des personnes et de leur caractère. Toutefois, ces réflexes de mentors sont travaillés, enrichis et réorientés par des formations.

 

Conclusion : 

Il n’y a donc pas d’âge pour être mentor et, dans une optique d’ouvrir le droit au mentorat, il est nécessaire d’étendre les espaces d’engagement pour accompagner plus et mieux nos mentors, quel que soit leur âge. Qu’ils soient seniors ou lycéens, le mentorat reste une expérience qui suscite des interrogations et des appréhensions : sur la posture à adapter, sur les compétences à transmettre, etc… Il est donc nécessaire de s’y adapter, parce qu’ouvrir le mentorat à d’autres profils de mentors, c’est contribuer pleinement au droit au mentorat. L’objectif n’est pas forcément de mobiliser plus large pour chacun, mais de concevoir le rôle de mentor tout au long de la vie, dans une optique de parcours d’engagement, en imaginant les passerelles au travers des moments de la vie de chacun, en créant une synergie entre nos mentors et nos structures.