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Workshop “Jeunes en action : vers une gouvernance participative des programmes de mentorat

📅 21 janvier 2025
⏱️ 1h30 en ligne

Intervenants:

  • Marie Aubert, Chargée de mission Accompagnement des démarches de participation, ANACEJ
  • Anita Kirpalani, Consultante
  • Gaël Courvallet, Responsable programme mentorat, ANAF
  • Laëtitia Mallet, Responsable territoriale Toulouse, Proxité

Animation : Fiona Soler Harroche, consultante spécialisée en mentorat
Modération : Fania Anoir, Collectif Mentorat

Alors que les jeunes sont au cœur des programmes de mentorat, ils sont encore trop souvent cantonnés à un rôle de bénéficiaires passifs. Cet atelier a exploré une question essentielle : comment impliquer durablement les jeunes dans la gouvernance associative, et plus largement dans les processus de décision associatifs qui les concernent ?

Dans un contexte où la participation des jeunes est de plus en plus valorisée à l’international, la France accuse un certain retard. Il devient donc crucial de s’interroger sur les manières de les associer à la conception, l’évaluation et l’évolution des dispositifs qui leur sont destinés.

Inclure les jeunes dans la gouvernance n’est pas un luxe, c’est une nécessité

Impliquer les jeunes dans les décisions des associations, et en particulier dans les programmes de mentorat, ne doit pas être considérée comme une récompense ou un aboutissement, mais comme un point de départ, une condition de pertinence et d’efficacité

« Ce qu’on considère souvent comme le stade ultime de l’engagement des jeunes – la gouvernance – devrait en réalité être le premier pas. » Anita Kirpalani.

Lorsqu’ils sont associés dès la conception ou intégrés aux organes de gouvernance, les programmes gagnent en légitimité, adaptabilité et impact réel. Ce n’est qu’en intégrant véritablement leur voix, dans les choix stratégiques comme dans les orientations quotidiennes, que les associations resteront pertinentes et alignées avec les réalités vécues par les jeunes.

Au-delà de la simple consultation, cette participation peut aller jusqu’à une codécision, permettant aux jeunes de devenir de véritables acteurs de la transformation sociale.

Donner la parole aux jeunes, c’est aussi les reconnaître comme experts de leur vécu

Le changement de regard sur les jeunes est fondamental. Il s’agit de passer d’une vision du jeune comme “bénéficiaire” à celle de “participant”, “usager”, voire “expert”. Leur expérience directe des dispositifs en fait des interlocuteurs légitimes pour les améliorer.

« Nothing for us, without us. » (Slogan cité d’une ONG américaine – « Rien pour nous sans nous »)

Ce basculement sémantique traduit un changement de posture : les jeunes ne sont pas là pour “recevoir” des dispositifs pensés sans eux, mais pour co-construire les solutions qui les concernent.

« L’un des mots qui revient le plus souvent chez les jeunes, c’est ‘sincérité’. Ce qu’ils demandent, ce n’est pas juste d’être consultés, mais qu’on tienne parole. » – Marie Aubert, ANACEJ

Il faut une redevabilité dans les démarches participatives. Dans ce sens, le retour qui est fait aux jeunes, après consultation, est indispensable pour maintenir leur engagement et leur confiance.

Inclure leur voix, c’est leur redonner une place active dans la société, renforcer leur pouvoir d’agir, et valoriser des compétences souvent invisibles – un levier puissant d’émancipation et d’engagement citoyen.

Des freins réels, mais surmontables avec des pratiques adaptées

L’inclusion des jeunes dans la gouvernance se heurte à plusieurs obstacles :

  • Des barrières d’accès (sociales, économiques, informationnelles)
  • Une posture adulte, parfois descendante, voire paternaliste
  • Un manque de transparence sur les rôles, les décisions ou les enjeux budgétaires
  • Des injonctions extérieures (notamment de certains financeurs) qui limitent la capacité à inclure des voix divergentes ou à mesurer l’impact autrement qu’en chiffres

Pour lever ces freins, il faut investir du temps dans l’accompagnement, la formation (des jeunes mais aussi des adultes) et veiller à créer des espaces de dialogue ouverts et authentiques, où les jeunes se sentent réellement légitimes à s’exprimer.

« Quand un jeune ose dire à un bénévole adulte ‘je ne suis pas d’accord avec toi’ — là, on sait qu’il s’est passé quelque chose. » – Laëtitia Mallet (Proxité)

Former sans formater : accompagner sans gommer la singularité

Un point clé soulevé par l’ensemble des intervenants est le risque de formatage. Si les jeunes doivent être accompagnés pour comprendre les rouages d’une association (lecture d’un budget, rôle d’un CA, posture en instance), il est essentiel de préserver la fraîcheur, la sincérité et la spécificité de leur regard.

« Ce n’est pas parce qu’un jeune siège à côté d’un PDG qu’il doit parler comme lui », nous rappelle Anita Kirpalani.

 « On ne peut pas leur demander de représenter les jeunes s’ils ne comprennent pas ce qu’est une association. Il faut leur transmettre les clés, sans leur enlever leur voix. » – Gaël Courvallet, ANAF.

Le rôle des adultes ici est double : ouvrir les codes sans imposer une norme ; accueillir une parole potentiellement décalée, mais justement précieuse, pour faire évoluer les pratiques établies.

« Il faut aussi former les membres du CA à écouter les jeunes, pas seulement l’inverse. » – Anita Kirpalani.

🔍 Comment faire concrètement ?

L’atelier a mis en lumière plusieurs leviers concrets pour intégrer les jeunes dans les processus de décision :

Créer des espaces de participation souples et progressifs

Comités jeunes, temps de réflexion collectifs, ateliers en co-construction : commencer par des formats souples, où la parole des jeunes est écoutée, valorisée et suivie d’effets. Il ne s’agit pas seulement de “donner la parole”, mais d’en faire quelque chose.

Favoriser une logique de co-construction dans les programmes

Avant de créer ou ajuster un dispositif, intégrer une phase de consultation active des jeunes. Cela peut passer par des entretiens, des groupes de parole, des questionnaires ou des tests pilotes. Intégrer cette étape au programme même, et non comme une étape “en plus”.

« On a ouvert un espace pour leur demander pourquoi ils ne venaient pas. Ils ont fini par nous proposer ce qui leur donnait envie de revenir. » – Laëtitia Mallet (Proxité)

Former les jeunes à la gouvernance… et les adultes à écouter

Former les jeunes aux rôles et aux responsabilités est important, mais cela doit aller de pair avec une évolution de la posture adulte. Trop souvent, les adultes détiennent les clés du savoir et reproduisent inconsciemment des rapports inégalitaires.

Aller vers les jeunes éloignés

Les jeunes qui s’engagent spontanément sont souvent déjà sensibilisés. Pour toucher les plus éloignés, il faut aller à leur rencontre, simplifier les modalités d’engagement, valoriser la diversité des profils, et ne pas attendre qu’ils viennent d’eux-mêmes.

Valoriser l’engagement des jeunes

Créer des passerelles pour valoriser leur engagement (CV, lettres de recommandation, certification de compétences) et leur permettre de devenir des ambassadeurs auprès d’autres jeunes, avec des effets de pairs puissants.

En conclusion

Inclure les jeunes dans la gouvernance des programmes de mentorat, c’est faire le pari d’une transformation profonde : celle d’un secteur qui écoute, qui s’adapte, et qui croit au potentiel d’une jeunesse non pas “à former” mais “à associer”.

Leur engagement ne doit pas être vu comme une “contrepartie”, mais comme une opportunité collective de construire des structures plus justes, plus transparentes et plus vivantes. Une gouvernance participative n’est pas un objectif lointain : c’est une voie d’avenir pour toutes les associations qui veulent rester pertinentes aux yeux des générations qu’elles accompagnent.

Le mentorat, ce n’est pas seulement accompagner. C’est aussi apprendre à laisser la place.

Propos recueillis par Fiona Soler Harroche

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